En 2020, l'Union européenne a adopté un Règlement Taxonomie. Sa mise en application sur plusieurs années doit répondre aux objectifs de l'Accord de Paris en matière de protection de l'environnement et de lutte contre le réchauffement climatique. Cette taxonomie verte européenne est une classification des activités selon leur impact environnemental, destiné à valoriser les entités écoresponsables qui s'inscrivent dans une démarche durable et à orienter les investissements vers les activités économiques vertes.
La taxonomie verte européenne en quelques mots
Atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050 est l'objectif ambitieux que s'est fixé l'Europe afin de préserver un monde vivable pour les générations futures. Elle a même revu à la hausse la réduction des émissions de gaz à effet de serre en 2030 afin de les réduire de 55 % (Fit for 55) par rapport à 1990, au lieu des 40 % prévus en 2015 par l'Accord de Paris.
Pour cela, la Commission Européenne a élaboré le Pacte Vert (Green Deal), une feuille de route vers la transition bas-carbone des États membres, le déploiement et la mise en œuvre d'un système de finance durable et la valorisation des acteurs engagés dans une dynamique écoresponsable.
Du Pacte Vert pour l'Europe découle la taxonomie européenne. En s'appuyant sur des critères scientifiques, elle classe les activités économiques selon leur contribution à la lutte contre le changement climatique. Ainsi, la taxonomie permet aux acteurs européens de se situer, d'évaluer leur durabilité, d'attirer des investissements qui favoriseront leur croissance et donc leur démarche positive, dans un cercle vertueux.
Qui est concerné par la taxonomie verte de la Commission Européenne ?
La classification de la taxonomie s'adresse à plus de 11 000 acteurs de la communauté européenne de différents secteurs d'activité (90 répertoriées en 2021). A elles seules, ces activités économiques représentent 93 % des émissions de carbone du territoire européen.
Les entités
Les États membres de l'Union Européenne sont les premiers concernés à l'échelle nationale. Pour faire partie du classement, ils doivent déployer des mesures concrètes, des labels ou des normes vertes (produits financiers, obligations…). Viennent ensuite les grandes entreprises de plus de 500 salariés soumises à la publication d'une déclaration de performance extra-financière (DPEF). Ces entreprises ont l'obligation de communiquer en toute transparence sur leurs activités durables, notamment en précisant la part de leur chiffre d'affaires investi.
Enfin, sont également concernés les acteurs financiers (institutions de supervision financière telles qu'une banque centrale d'un Etat membre, banques…).
Les activités concernées par la taxonomie
Trois niveaux d'activité sont concernés par la classification de la taxonomie verte :
- les activités bas-carbone qui répondent déjà aux objectifs de l'Accord de Paris (énergies renouvelables...)
- les activités qui contribuent à la transition écologique avec pour objectif le zéro émission nette à l'horizon 2050
- les activités habilitantes qui permettent de réduire les émissions GES d'autres activités et les activités transitoires qui les aident à s'engager dans une démarche de développement durable.
Pour intégrer le classement vert de la taxonomie, elles doivent correspondre et contribuer substantiellement à au moins l'un des six objectifs environnementaux suivants :
- l'atténuation du changement climatique
- l'adaptation au changement climatique
- l'utilisation durable et la protection des ressources aquatiques et marines
- la transition vers une économie circulaire
- le contrôle de la pollution
- la protection et la restauration de la biodiversité et des écosystèmes.
De plus, les activités concernées par la taxonomie ne doivent pas porter de préjudice notable aux autres objectifs environnementaux selon le principe Do no significant harm. Elles ont également des obligations de respect des normes sociales (droits humains, conditions de travail…) et de conformité aux critères d'examen techniques permettant leur intégration dans la taxonomie européenne.
La question des énergies fossiles et du nucléaire dans la taxonomie verte
La taxonomie verte fixe un critère d'intégration concret : l'activité doit émettre moins de 100 grammes de CO2 au kilowatt/heure pour être considérée comme verte. Ce critère élimine d'emblée les énergies fossiles (gaz naturel, charbon, pétrole et dérivés) car elles sont fortes émettrices de gaz à effet de serre (dioxyde de carbone, méthane…) durant tout leur cycle de vie, de l'extraction à la combustion. En effet, en prenant en compte les Scope 2 et 3, le gaz affiche au moins 500 grammes de CO2/kWh, 1 000 grammes pour le charbon. Si le projet de transformation de nos modes de vie implique l'abandon rapide des énergies fossiles au profit des énergies renouvelables, il y a forcément une période de transition inévitable avec le nucléaire et le gaz.
Pour l'énergie nucléaire, c'est plus compliqué car l'activité en elle-même n'émet que très peu de gaz à effet de serre équivalent CO2. Elle pourrait donc être intégrée dans la première catégorie d'activité puisqu'elle contribue à l'atténuation du changement climatique par la production d'électricité décarbonée. Cependant, elle porterait atteinte aux autres catégories d'activités vertes et ne répondrait donc littéralement pas aux objectifs de la taxonomie verte.
La place des énergies fossiles et du nucléaire dans la taxonomie européenne a donc été laissée en suspens lors de la première mouture du dispositif en 2020 sur cette activité. En 2022, la Commission Européenne a proposé une mise à jour du texte pour intégrer ces activités en tant qu'énergie de transition, une mesure qui entre en vigueur au 1er janvier 2023. Cela signifie qu'on reconnaît leurs émissions GES supérieures à la norme fixée mais qu'on les considère comme nécessaires à la transition énergétique puisqu'elles remplacent des activités encore plus polluantes. Néanmoins, elles devront répondre à certains critères :
- gaz (favoriser les gaz moins polluants…)
- nucléaire (obtenir un permis de construire avant 2045, mieux traiter les déchets issus de l'activité nucléaire…).
Taxonomie verte et reporting extra-financier
Les entités d'intérêt public concernées par la taxonomie européenne le sont aussi par les exigences de publication d'informations non financières. Afin d'étendre leur nombre à 50 000 entités dès 2024, la NFRD - Non-Financial Reporting Directive - cède la place à la plus large CSRD - Corporate Sustainability Reporting Directive. Elles auront donc l'obligation de publier différentes informations :
- part du chiffre d'affaires provenant de produits ou services liés aux activités vertes (durables, transitoires ou habilitantes)
- part des dépenses d'investissement (CapEx) et d'exploitation (OpEx) associées aux activités vertes.
Qui est concerné par le reporting extra-financier ?
Le but de ce rapport est de "communiquer sur les implications sociales, environnementales, sociétales de ses activités ainsi que sur son mode de gouvernance" (Ministère de la Transition Écologique). Il applique la directive européenne du 22 octobre 2014, entrée en vigueur en France en juillet 2017.
Actuellement, seules les grandes entreprises ont une obligation de publication, soit :
- les sociétés cotées en bourse avec un chiffre d'affaires égal ou supérieur à 40 millions d'euros net ou avec un bilan annuel total de 20 millions d'euros
- les entreprises de 500 salariés ou plus
- les sociétés non cotées en bourse de 500 salariés ou plus et avec un chiffre d'affaires ou un bilan annuel total d'au moins 100 millions d'euros.
Néanmoins, les entités sans obligations peuvent rédiger et publier ce reporting extra-financier car il leur apporte de nombreux avantages. Il s'inscrit dans la démarche RSE (Responsabilité Sociétale et Environnementale) des entreprises.
Que contient le reporting extra-financier annuel ?
Les entités doivent publier leurs résultats financiers mais pour une meilleure transparence de leur activité saisie dans sa globalité, le rapport inclut d'autres éléments d'analyse des risques et des résultats RSE.
La partie sociale
Il concerne l'impact social avec des résultats liés à l'emploi (organisation du travail, égalité des chances, diversité, santé et sécurité au travail...) et à la société (relations avec les parties prenantes (fournisseurs, clients ou usagers...), répercussions économiques et sociales sur le territoire...).
La partie environnement
Il développe également l'impact environnemental de l'activité et la mise en œuvre d'un développement durable avec la politique globale de l'entreprise concernant l'environnement : utilisation d'une énergie renouvelable, gestion des déchets et de la pollution engendrée par l'activité...
Ce point offre l'occasion de dresser un bilan carbone de l'activité, de prendre vraiment la mesure de l'incidence de l'activité sur la planète et d'élaborer des solutions de transformation, notamment en termes de réduction des émissions GES en tenant compte des 3 Scope.
C'est en abordant et en développant tous ces enjeux dans son reporting extra-financier que l'entreprise met en valeur son modèle d'affaires et son plan d'action, les mesures à prendre pour atteindre la neutralité carbone horizon 2050.
Pourquoi rédiger et publier ce reporting extra-financier dans le cadre de la taxonomie ?
Certaines entreprises ont une obligation de publication. Pour les autres, le contenu du document doit apporter un éclairage transparent sur l'activité et peut attirer des investissements. Ces enjeux ne sont pas négligeables pour les TPE et PME qui ont une ambition de développement.
En évitant tout greenwashing, communiquer sur un projet de développement durable social et environnemental sera bénéfique et valorisant à tous points de vue. Lorsque le moment sera venu, les entreprises qui déploient une finance durable entreront dans la classification des activités économiques de la taxonomie européenne et attireront davantage d'investissements verts.
Quels sont les avantages à intégrer la classification des activités économiques de la taxonomie verte ?
La figuration des activités économiques dans la taxonomie européenne est un échange gagnant-gagnant pour les entités et les investisseurs. Elle offre une vitrine officielle aux entreprises impliquées dans l'atténuation du réchauffement climatique (objectif 1) et dans une démarche de résilience d'adaptation au changement climatique (objectif 2). Elles bénéficieront ainsi d'une plus forte attractivité auprès des investisseurs en quête de placements financièrement avantageux et bénéfiques pour l'environnement. De plus, les risques de greenwashing seront réduits grâce à une meilleure définition des activités vertes.
Du côté des investissements, la taxonomie verte est tout autant profitable car les investisseurs pourront s'appuyer sur un classement fiable en évitant ainsi les placements mauvais pour leur image, nocifs ou discutables en termes d'impact environnemental.
A une échelle plus globale, la taxonomie est une mesure importante de la transition vers une économie plus écologique devenue indispensable. Il amène du concret en permettant de qualifier et quantifier plus précisément les actions déployées par les différents acteurs, avec plus de transparence pour la population de l'Union Européenne et mondiale.
Les grandes dates de la taxonomie verte européenne
- Juin 2020 : adoption du Règlement de la taxonomie verte et de son plan d'action par la Commission Européenne
- Janvier 2022 : mise en application du règlement sur les deux premiers objectifs environnementaux de la taxonomie européenne et obligation de déclaration d'éligibilité de tous les acteurs concernés
- Avril 2022 : ajout des quatre autres objectifs environnementaux à la taxonomie européenne
- Juillet 2022 : validation de l'intégration du gaz et du nucléaire comme énergies transitoires au Parlement Européen
- Janvier 2023 : mise en application de la taxonomie avec obligation de déclaration d'alignement sur les objectifs par les entités concernées (entreprises, gouvernement...)
- Janvier 2024 : obligation de déclaration par les institutions financières, entrée en vigueur de la CSRD avec étalement jusqu'en 2028.
La taxonomie verte que la Commission Européenne a élaborée n'est pas une révolution en matière de transformation profonde de l'activité économique du territoire. Pourtant, les questions soulevées et les critères du projet constituent un plan de finance durable et de relance des investissements pertinent à l'échelle mondiale.
Ils favoriseront à la fois une prise de conscience et une feuille de route à suivre pour préserver autant que possible la planète du dérèglement climatique.
Quel lien entre taxonomie verte et compensation carbone ?
Même la taxonomie ne parle par directement de compensation carbone, elle vise à orienter les stratégie et investissements des entreprises. L'un des critères de la taxonomie verte est lié à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Les activités éligibles pour la taxonomie verte doivent contribuer à réduire les émissions de gaz à effet de serre d'au moins 40 % par rapport à un scénario de référence. Inutile de davantage s'étaler sur lien possible entre cette réglementation et votre politique de réduction/compensation des émissions. Les projets de compensation carbone en entreprises peuvent donc être considérés comme des activités contribuant aux critères de la taxonomie verte européenne. Cependant, il est important de noter que la taxonomie verte européenne couvre de nombreux autres critères liés à l'environnement et à la durabilité, et que la participation à un projet de compensation carbone ne garantit pas automatiquement la conformité à tous les critères de la taxonomie verte.
Backcarbone peut vous accompagner dans votre stratégie de neutralité et d'alignement avec cette taxonomie.